Stripped – Chapitre 15

Affaires risquées

“Il n’y a jamais eu de moment où j’ai pensé finir le groupe, mais j’ai toujours pensé après chaque projet que c’était 50-50 si oui ou non les membres du groupe reviendraient effectivement pour ressentir l’enthousiasme et la passion pour commencer un autre projet”.
– Martin Gore, 2001

En discutant le contenu controversé de Master And Servant (sorti le 20 août 1984), Dave Gahan a dit au Melody Maker : “On doit prendre des risques. On ne peut être en sécurité tout le temps, même si le genre de gens qu’on pourrait offenser sont juste la sorte à faire des histoires, à lancer des pétitions et tout ça. C’est toujours une minorité”.

Lors du mixage de Master And Servant, le but déclaré de Depeche Mode était d’améliorer le “son de basse rond et gras” qui avait dominé des enregistrements contemporains tels que Relax de Frankie Goes To Hollywood. Selon Alan Wilder : “On a complètement pété plus haut que nos culs et on a fini à l’opposé complet, et pour couronner sept jours de mixage, on a omis un petit détail – la caisse claire ! Le coût de cette omission cruciale a été remarqué quand Gareth [Jones] et Dan [Miller] ont galopé un soir dans un club local de Berlin, armés d’un pressage teste et s’attendant complètement à souffler la tête des locaux. Par la loi de l’emmerdement maximum, le morceau est passé tout de suite après Relax. Comme on pouvait s’y attendre, il a vidé le dancefloor, les laissant tous les deux debouts, gênés dans leurs impers, leurs mallettes à la main”.

Depeche Mode a regagné un peu la face, en battant par la suite les fans de Frankie aux jeux d’alcool à Dortmund. “Il y avait beaucoup de tequila impliqué, et on a gagné, se pavoisait Alan Wilder. Je me souviens qu’on a joué au foot, et on a gagné de façon éclatante, contre la maison de disques allemande en 1985, et, pour couronner notre victoire, quelqu’un de notre camp a réussi à casser les jambes d’un de leurs joueurs ! en guise d’excuses, on n’a pas pu résister à leur envoyer une carte de bon rétablissement sur laquelle on avait simplement écrit : 1945… 1966… 1985”.

À part Frankie, Depeche Mode avait peu de contact avec leurs autres rivaux. “On croisait Spandau [Ballet] et Duran Duran tout le temps au début des années 1980, a révélé Alan Wilder. Je pense qu’il y avait probablement de la rivalité”.

Andy Fletcher : “On détestait des gens comme Spandau Ballet et The Human League – pas tant Spandau, mais définitivement Duran Duran, parce que sur Top Of The Pops Simon LeBon [le chanteur de Duran] était du genre : J’aime vraiment des trucs que vous faites, ouais. Ils se voyaient permiers de la premier [league de football], et on se battait troisièmes en partant du bas, première division ou quelque chose. Ils avaient 24 gardes du corps, 64 voitures ! Beaucoup d’années se sont passées depuis qu’on les croisait !”

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Master And Servant a pris sept jours renversants à être mixé. “C’était assez marrant à enregistrer, a dit Alan Wilder. Si on écoute bien, en plus des sons de fouets, on peut entendre deux filles de Basildon qui chantent : Treat me like a dog”.

Avec ces paroles, Depeche Mode a échappé de peu à un ban de la BBC. Comme Dave gahan s’est souvenu : “On a eu des problèmes avec Master And Servant quand la BBC a demandé une copie des paroles, mais seulement un seul gars pensait qu’elles étaient obscènes, et il était en vacances quand la décision finale a été prise ! La fille qui a pris la décision était d’accord avec nous sur le fait qu’elle parlait d’amour et de vie, ce qui est bien sûr le cas”.

S’ayant frayé un chemin au milieu de la censure, Master And Servant a atteint la sixième place en septembre 1984, malgré les chroniqueurs dissidents – comme Dave Walters de Time Out, qui a cruement demandé : “Qu’attendez-vous de ce groupe de crétins ?” – et un autre clip réalisé par Clive Richardson a été tourné à Berlin, avec ce que Alan Wilder se souvenait comme  0147le moment de clip le plus embarrassant de tous les temps – et crois-moi, il y en a eu beaucoup”. Ce “moment” en question était la danse “eetsa lot, eetsa lot”, grâce à un chorégraphe français employé spécialement pour l’occasion.

Alan Wilder : “Plus inquiétant, cependant, était l’annulation d’un jour de tournage après que des coups de poing s’en sont ensuit entre deux membres du groupe. Provoqués à la suite qu’un ait réprimandé l’autre de boire excessivement, le camp de Depeche Mode s’est senti décidément mal à l’aise pendant toute une semaine après ça jusqu’à ce que le statut quo soit finalement restauré, un accord de paix atteint, et le couple heureux réconcilié autour des machines Space Invaders des studios Hansa – non pas que je mentionne des noms, bien sûr, sauf que quand Dave [Gahan] a essayé d’attirer mon attention pour regarder cet amusant spectacle, j’étais préoccupé par quelque chose d’autre et je l’ai raté”.

Adrian Thrills du NME était un autre journaliste loin d’être transporté par Master And Servant : “Leur soucis est le jeu de l’humiliation sexuelle et de savoir si oui ou non ils sont sérieux (douteux) ou font simplement une observation ironique sur le marché cuir et domination (inutile), c’est l’auditeur qui souffre au bout pour leur art”.

En ce qui concernait Martin Gore, les critiques étaient loin de la vérité : “Il y a toujours eu une certaine quantité d’humour dans notre musique que les gens n’ont jamais vu – on nous a jamais posé de questions dessus. Sur le LP actuel [Some Great Reward] il y a un couplet [extrait de Something To Do] qui commence par : Tu ressens l’ennui aussi… et tout le monde l’a simplement accepté sans y réfléchir”.

“Tant de chansons sont vraiment marrantes ; il y a beaucoup d’expressions de Basildon”, a dit Andy Fletcher à Don Watson du NME. « Des choses qu’on entend des gens dire à Basildon, mais pas trop autre part. La plupart sont assez humoristiques en soi, mais la plupart des gens ne les pigent pas – en particulier s’ils ne viennent pas de Basildon ; des choses comme : The world we live in and life in general [extrait de Somebody]. Je veux dire, les gens ne semblent pas vraiment penser qu’on est sérieux quand on écrit des choses comme ça”.

En effet, le groupe est allé jusqu’à incorporer cette expression “Basildonienne” au dos de la pochette de l’album – qui juxtaposait un couple de mariés sur un fond d’usine métallique faiblement éclairé. “Cette pochette était en fait inspirée parce qu’on ressentait être le contenu lyrique du disque : un couple romantique qui fait face au vrai monde”, a expliqué Wilder.

Pourtant, comme Fletcher l’a dit au Melody Maker, le groupe n’a pas toujours eu la vie facile : “À Basildon, on m’insulte beaucoup. Beaucoup de personnes pensent encore qu’on est des mauviettes pour adolescentes – des mauviettes aux synthés. C’est une ville de racailles – ceux qui squattent les pubs et boivent beaucoup de bière. Je suppose que c’est parce qu’on a toujours vécu là-bas – ils nous ont tellement vu qu’ils se sont retournés contre nous. Partout ailleurs, des gens chantent en fait nos louanges. Je pense que c’est un bon contraste, parce qu’on n’aime pas le truc pop star. C’est bon d’être un peu insulté ; ça vous remet les pieds sur terre”.

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Aux États-Unis, la réponse au dernier single – fouets qui claquent et tout cela – a été quelque peu attenué en comparaison avec People Are People. Rentrant dans le Billboard le 7 septembre (après les sorties simultanées du 45 tours et maxi 45 tours le 14 août), Master And Servant a culminé à la 87ème place avant de retomber après trois petites semaines. Pas même des altérations sur maxi 45 tours par le remixeur radical Adrian Sherwood – dont une version pratiquement méconnaissable de People Are People (rebaptisée de manière appropriée Are People People?) – n’ont pu renverser son sort.

Tandis que Master And Servant serait le dernier single de Depeche Mode outre-Atlantique avant un moment, l’intérêt a été prolongé dans les charts albums du Billboard, avec Some Great Reward fixé pendant 42 semaines impressionnantes, culminant à la 52ème place – pas mal pour un soi-disant “groupe d’un tube”.

Andy Fletcher : “C’était notre premier gros album aux États-Unis. Il y avait une stratégie dans le sens où on voulait sortir de Berlin et, deuxièmement, on voulait montrer aux gens à l’étranger qu’on marchait très bien – qu’on n’était pas un groupe britannique typique ; qu’on se considérait comme un groupe au son européen”.

La question principale était si Depeche Mode avait assez de confiance ou pas pour ajouter à ce succès une tournée aux États-Unis en 1984. Certainement, Dave Gahan n’a mentionné aucun concert américains imminents quand il a informé le Melody Maker que le groupe était “sur le point de s’embarquer dans une énorme tournée – plus de dates qu’on ne voulait faire, vraiment, qui se terminera vers Noël et qui traversera l’Allemagne, la Suède, la Hollande, la Belgique, l’Italie et la Suisse.

“Après ça, la plupart d’entre nous voudra des vacances. La dernière tournée américaine s’est terminée juste avant Noël et à ce moment, c’était très difficile de faire quelque chose différent chaque soir. Mon esprit dérivait parfois et j’oubliais les paroles. C’est même pire pour els autres, parce qu’ils vont être coincés derrière deux Emulators, et il n’y a pas moyen pour eux de bouger sur scène. Mais une grande partie du public ne semble pas remarquer qu’on ne bouge pas trop. J’aime bouger sur scène maintenant – à un moment, je restais immobile en m’accrochant au pied de micro, mais maintenant je vais voir différentes parties du public et je leur fais de la lèche”.

Désormais, le motif du programme de la tournée du groupe prenait une forme familière ; malgré admettre s’exciter tous les soirs à commander des publics de plusieurs milliers de fans enthousiastes, Gahan était conscient des pièges potentiels de tels longs voyages sur la route. “Il y a quelques jours de congé, mais les concerts sont surtout enchaînés. Quand on a un jour de congé, c’est toujours un dimanche à Hanley. As-tu déjà été à Hanley un dimanche ? Tu jettes un œil à quelques boutiques d’antiquités, tu te promènes en pensant : Mais qu’est-ce que je peux faire ?, tu retournes à l’hôtel et mates des vidéos. C’est horrible”.

Les bandes rythmiques sont réapparues – bien que désormais hors scène – tout au long du Some Great Reward Tour. “On était conscients des limitations de l’utilisation de bandes rythmiques – ça enlève beaucoup de spontanéité, mais on ne peut se voir jouer avec un batteur sur scène en ce moment, le groupe a dit au Melody Maker. Personne ne savait jouer assez précisément ou nous donner tous les sons qu’on avait utilisés en studio, mais on a trouvé d’autres moyens de rendre les choses un peu plus visuelles. On a un décor qui bouge avec beaucoup d’échaffaudages, des diapositives et ainsi de suite pour s’assortir à la pochette de l’album [Some Great Reward]. Jane [Spiers], qui a travaillé avec nous la dernière fois, voulait aller plus loin avec certaines idées”.

Certainement, les lumières inventives de Jane Spiers étaient plus impressionnantes qu’avant, particulièrement durant Blasphemous rumours – autre chanson controversée destinée à sortir en prochain single de Depeche Mode – quand de grands triangles en néon s’élevaient majestiquement autour des trois claviéristes, contrastant efficacement avec les faux vitraux d’église projetés sur des écran au dessus.

En plus de l’habituel mélange de synthétiseurs et de samplers, les percussions comprenaient désormais de la tôle ondulée et des rayons de roue de vélo, comme la future femme de Alan Wilder, Hepzibah Sessan dit “Hep”, prenait plaisir à se moquer joyeusement : “Quand je classais un gros camion de souvenirs de DM, je suis tombée sur un diagramme très détaillé – dessiné par Alan – pour illustrer des percussions élaborées, qui incluaient des morceaux d’échaffaudages, un marteau et divers attirail de construction. Pauvre con !”

En fait, le Melody Maker a rapporté que Depeche Mode était l’un des premiers groupes à prendre la dernière machine de rêve de E-mu sur la route : “Des Emulator 2 [sic] ont été rapidement choisis par Depeche Mode et d’autres musiciens judicieux – les garçons de Basildon ont en fait pris la chose sur scène alors qu’elle sortait encore chaude du SAV de Syco, mais a eu quelques problèmes avec la logiciel de la machine”.

Alan Wilder : “C’était un exercice logistique. Les versions live étaient structurées de telle sorte à ce que tout le monde pouvait changer son son en temps pour être prêt à faire sa première partie de clavier. Parfois des intros étendues étaient programmées pour couvrir ce problème. Puisque ça prenait environ 30 secondes pour que chaque banque de sons se charge, il était souvent incertain si tout le monde allait être prêt en temps et en heure. Les Emulators d’après avaient des disques durs internes, alors on était capables de conserver tous les sons sans avoir recours à des disquettes”.

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À l’Empire de Liverpool le 29 septembre – trois dates après le début de la tournée britannique de 29 dates – Penny Kiley du Melody Maker était loin d’être impressionnée : “La musique commence avec des cris, toute la salle rebondit au moment où le rideau se lève sur quatre rampes, trois clavies, un magnétophone et un gars vêtu de cuir qui remue des hanches. Le décor scénique, design impressionnant d’un gris à la mode, combine le métal hi-tech avec des projections occasionnelles et veut clairement dire quelque chose sur la msuique. Mais s’il y a du métal dans le son, il est fondu. Il n’y a pas de bord. Que la musique soit bubblegum, metal ou douce, l’événement est simplement pop et les messages les plus forts sont visuels”.

La tournée britannique s’est finie par quatre performances consécutives à l’Hammersmith Odeon le 4 novembre, avant de se diriger vers la Scandinavie pour commencer une tournée exténuante en Europe continentale qui a vu le groupe faire 30 concerts dans des salles de taille de stades avec uniquement deux jours de congé. Au même moment, Depeche Mode a placé une autre single, Blasphemous Rumours, dans les charts britanniques.

Andy Fletcher : “Quand Martin m’a fait écouter Blasphemous Rumours, j’étais assez offensé. Je peux comprendre pourquoi les gens la détesteraient. Elle frôle certainement l’offensif. La chanson tire son origine de nos expériences [à la Boy’s Brigade]. Il y avait une liste de prière avec les noms des gens qui étaient malades d’une certaine manière et on priait pour la personne en tête de cette liste jusqu’à ce qu’elle meure.

“Je me suis détourné de la religion parce que je trouvais que je menais une vie vraiment ennuyante. Je voulais vivre au maximum, mais j’étais piégé, et j’ai pensé : Si je meurs demain, ça sera fait. C’est dommage que la chrétienté soit pervertie et qu’on en parle autant, mais qu’elle a quelque chose à offrir”.

Malgré l’insistence de Dave Gahan que Blasphemous Rumours n’était pas une chanson anti-religieuse, mais plutôt “une déclaration personnelle de la part de Martin”, Depeche Mode doit avoir su que certains seraient ennuyés par les observations de Gore. avec une possible interdiction à l’esprit, Blasphemous Rumours a été associée avec la considérablement moins controverselle Somebody en double face A quand elle est sortie le 29 octobre.

Martin Gore : “Somebody est une chanson je t’aime assez simple si tu veux, certainement pas un chanson anti-amour”.

Andy Fletcher : “[Ce] n’est pas simplement une chanson d’amour, c’est une [chanson] vraiment tendre… Martin est à nouveau amoureux, tu vois ?” (Somebody était, sans aucun doute, inspiré par la petite amie de Gore, Christina Friederich.)

Martin Gore : “Une chanson d’amour peut n’avoir complètement l’air de rien ou elle peut sonner vrai. Certains ont tendance à penser que les chansons d’amour ne devraient pas être traitées au sérieux, ce n’est seulement si tu écris à propos de problèmes sociaux qu’une chanson devient sérieuses”.

Cependant, en 1990, Gore avait une perspective différente : “Je n’arrive tout simplement pas à écrire des chansons pop conventionnelles. Une chanson plaisante pour moi n’est pas finie ; elle ne raconte pas l’histoire en entier, ce qui est la raison pour laquelle j’ai introduit la tournure à la fin de Somebody parce que la chanson était tout simplement trop sympa.

“On [peut] dire que je suis cynique à propos de l’amour dans mes chansons, et c’est peut-être le cas mais je pense que c’est un angle intéressant. Sinon on devient banal comme la plupart de la musique présente dans les charts. Les relations ont leur côté sombre, et j’aime écrire dessus”.

Le côté sérieux de Somebody était souligné par le battement subtil d’un cœur sous l’accompagnement d’Alan Wilder au piano. Comme un observateur l’a dit : “La chanson est devenue une favorie sur scène, touchant les cordes sensibles de toutes les filles du public qui ne pouvaient s’empêcher de penser qu’elle était dirigée seulement pour elles et qui marquaient leur appréciation par des cris à chaque fois que Martin s’arrêtait pour reprendre sa respiration”.

Comme on pouvait s’y attendre, c’était Blasphemous Rumours qui a recueilli la majorité de l’attention. L’assistant du rédacteur en chef de Smash Hits Neil Tennant l’a vu comme “un bout de routine mélancolique dans lequel on passe un sérieux savon à Dieu”. (1) Loin de sonner mélancolique, le refrain était à la fois levé et réjouissant, bien qu’il faut reconnaître, on ne peut dire la même chose des couplets sinistres – où Gahan, repris en chœur comme d’habitude par Gore, chantait à propos de divers personnages, dont une mère qui pleure sa fille de 16 ans qui a tenté de se suicider et la mort d’une fille de 18 ans, victime d’un chauffard qui a trouvé Dieu – posé sur une toile de fond d’effets sonores glaciaux et d’hautbois renversés affligés. Le groupe a habilement ressucité l’idée de la séquence de rêve de boîte à musique, d’abord explorée sur Shouldn’t Have Done That sur l’album A Broken Frame, seulement, désormais elle portait une qualité plus cauchemardesque, soulignée par une interprétation instrumentale de 16 mesures astucieusement déguisée de la chanson enfantine Jesus’ Love Is Very Wonderful.

On a à nouveau fait appel à la nouvelle société de Clive Richardson, Clive Richardson Films Ltd, pour créer et filmer des clips en octobre 1984. Le simpliste Somebody présentait un gros plan d’un Gore complètement habillé faisant du play back sur son chant tout le long, entrecoupé par des plans de profil de Wilder qui joue sur un piano à queue Bösendorfer, portant sa mèche “Hovis” habituelle de l’époque. Des images façon cinéma amateur de vacances des autres membres du groupe batifolant sur une plage complètait la scène – on voulait qu’il fonctionne plutôt qu’il gagne des récompenses. Blasphemous Rumours a été filmé durant la partie britannique du Some Great Reward Tour, donnant une impression de première main de ce qu’était un concert de Depeche Mode de l’époque – rayons de vélo et tout.

Des personnes se sont inquiétés du soi-disant blasphème de la chanson. Ayant pris l’accroche de Martin Gore au premier degré, un pasteur de Southend a dit : “Si on peut dire que Dieu aimait tant le monde qu’il y a envoyé son fils unique – s’il a fait cela, on ne peut dire qu’il avait un sens de l’humour macabre”.

Somebody / Blasphemous Rumours a échappé à un ban de la BBC et s’est hissé à la 16ème place. Si on considère que les deux chansons étaient facilement disponibles sur Some Great Reward (bien que Somebody ait été remixée alors que Blasphemous Rumours ait été légèrement éditée), c’était une position dans les charts raisonnable. Une version complète de six minutes de Blasphemous Rumours a rapidement été rendue disponible en maxi 45 tours, couplée à quatre morceaux live enregistrés au Liverpool Empire le 29 septembre – à savoir, Somebody, Two Minute WarningIce Machine et Everything Counts. De plus, un EP 45 tours de quatre morceaux comprenant les deux chansons du single standard, plus des versions live de Everything Counts et Told You So, est sorti pour tirer sur les cordons de la bourse des fans de Mode les plus frénétiques.

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Après la fin de la partie européenne du Some Great Reward Tour à Deinze en Belgique le 18 décembre, Dave Gahan a eu sa récompense – de longues vacances. Presque six mois, en fait. Ayant travaillé sans répit durant la quasi-totalité de l’année passée, Depeche Mode avait certainement gagné le droit de se reposer.

Détendu comme il se doit, en mars 1985, le groupe s’est réunit une fois encore avec les co-producteurs Daniel Miller et Gareth Jones à Hansa à Berlin Ouest. Un nouveau single, Shake The Disease, est sorti le 29 avril, atteignant la 18ème place en mai. Carol Linfield de Sounds était impressionnée : “Rythmes flexibles, trucs classiques des Modes… parfaitement contagieux”. L’obligatoire maxi 45 tours en édition extra limitée comprenait un enregistrement live de Master And Servant (du concert au Liverpool Empire de l’année précédente), avec le “Metal Mix” de Something To Do, chanson extraite de Some Great Reward.

Le perfectionniste en studio de service, Alan Wilder, avait des sentiments partagés à propos de Shake The Disease : “C’est toujours l’une de mes chansons préférées de Martin, mais je ne pense pas qu’on en ait tiré le meilleur. Je suspecte que tout le monde essayait trop de rendre son son spécial, en particulier Daniel [Miller]. Je pense qu’il y a eu un moment où Daniel s’est trop impliqué dans la technologie : je me rappelle d’un son particulier qu’on a créé pour Shake The Disease. La partie en elle-même était pratiquement idiote – un riff de deux notes. Et on a fini par utiliser 24 couches de sons les unes sur les autres – tous les sons de l’orchestre ! Bien sûr, elles s’annulaient les unes les autres, et le résultat final sonnait comme une onde sinusoïdale ! Ça résumait bien comment on pouvait péter plus haut que nos culs !”

Bien qu’induscutablement un enregistrement poli, Shake The Disease n’était pas un digne successeur de People Are People, de Blasphemous Rumours ni même de Everything Counts, étant desservi par une ligne de basse synthétique terne et un accompagnement de boîte à rythmes fatiguant. Selon Gareth Jones, “la session [pour Shake The Disease} n’a peut-être pas aussi bien pris que nos autres sessions ensemble”.

Pourtant, Dave Gahan a livré une performance honorable, ayant récemment pris des cours de chant avec la coach vocale renommé de Londres, Tona deBrett – “les gammes et tout ça, et je ne voyais pas bien l’application au chant des popsongs, mais je voulais en faire plus pour contrôler ma respiration”, a dit Gahan au Melody Maker en septembre 1984. En effet, les arrangements de l’harmonie vocale de la chanson étaient aussi bons, si non meilleurs, que sur n’importe quelle chanson de Depeche Mode en date.

Un nouveau réalisateur, Peter Care, a été appelé pour le clip du single, tourné à et autour du quartier des Docklands de Londres alors abandonné. Alan Wilder, photographe amateur à ses heures perdues, a décrit le processus de tournage : “Le clip utilise des séquences de chute libre qui sont faites par une assez simple illusion d’optique. Le sujet est attaché à une perche motorisée qui passe dans sa veste dans le dos. Tandis que la perche tourne sur elle-même, elle l’emmène, la caméra suit le même angle, ce qui donne l’impression que le sujet reste immobile et que tout le fond bouge. Peter a également utilisé un autre truc similaire où la caméra est attachée à soi sur une sorte de harnais rigide – aucune caméraman [n’est impliqué]. Tandis que tu bouges avec la caméra, tu apparais encore une fois immobile alors que le fond bouge”.

“Understand me” (“Comprends moi”), implore un Martin Gore extrêmement maquillé, faisant du play back sur le mémorable refrain de la chanson. Un coup d’œil au choix inhabituel de Gore de vêtements noirs, dramatiquement contrasté par une explosion de cheveux blonds peroxydés crépus qui sortait de sa tête rasée, et il est probable que beaucoup aient essayé la même chose !

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Les dernières aventures de Depeche Mode sur bande et sur l’écran ont été prises en étau par une tournée nord-américaine de 16 dates qui couvrait tout le continent (leur première depuis 1983), s’arrêtant à Washington, New York, Boston, Montréal, Toronto, Detroit, Chicago et Rock Island avant un concert exceptionnel à Carbondale en Pennsylvanie, suivi par le Texas et culminant sur la Côte Ouest en Californie, au Fox Warfield Theater de San Francisco le 3 avril 1985.

Le concert au Hollywood Palladium d’une capacité de 3500 personnes du 30 mars aurait été complet en moins d’un quart d’heure après la mise en vente des billets, tandis que l’énorme demande pour le concert de Southern California qui l’a suivi a forcé les promoters de prendre le risque de réserver l’énorme amphithéâtre en plein air d’une capacité de 10 000 places, l’Irvine Meadows, à Laguna Hills à sa place. Incroyablement, le jeu en a valu la peine alors que le groupe a marqué d’autres guichets fermés, tout cela plus remarquable étant donné que leur seul tube américain, People Are People, était vieux de presque un an.

L’inlassable soutien radio de stations telles que KROQ 97.6 portait manifestement ses fruits, comme l’a confirmé plus tard Alan Wilder : “Ils soutenaient beaucoup DM depuis longtemps, ce qui a aidé notre carrière aux États-Unis”.

Martin Gore : “Les deux premières fois où on y est allés, on a eu une très mauvaise réponse de la presse. On semblait se défendre partout où on allait, et on avait presque baissé les bras. On a décidé de ne pas y jouer. Quelqu’un nous a convaincu d’y retourner, et tout avait tellemen changé”.

Les téléspectateurs américains ont eu leur premier avant-goût de Depeche Mode en mai 1985, grâce à The Cutting Edge de I.R.S. Records , sur le réseau MTV. Superposés sur une performance livre de Blasphemous Rumours (filmé à la Alsterdorf Sporthalle de Hambourg le 9 décembre 1984), les quatre membres réfléchissaient à leurs méthodes de travail – méthodes qui ont dû sembler extraterrestres à l’acteul climat rock américain.

Ayant récemment attrapé la bouteille de décoloration, c’est une Dave Gahan d’un blond éclatant qui a parlé en premier : “Quand on utilise de l’électronique, on n’a pas besoin d’être techniquement un excellent musicien ; on n’a pas besoin d’être capable de jouer techniquement de la guitare et d’être un grand guitariste. Avec beaucoup de groupes, c’est qui sont les meilleurs musiciens, mais avec l’électronique, on peut avoir de bonnes idées”.

Le suivant était Alan Wilder : “Je n’ai jamais compris l’attitude selon laquelle les synthétiseurs ne produisent pas de vraie musique, parce qu’avec n’importe quel instrument, ce sont les gens qui produisent la musique de toute manière. Ce n’est pas l’instrument ; c’est la manière dont on utilise l’instrument, alors c’est ce qui est important”.

Andy Fletcher – qui présentait aussi des cheveux peroxidés – a tenté imprudemment de prendre une route plus technique en déclarant, pas entièrement véridiquement : “On n’utilise plus beaucoup de synthés, vraiment. On utilise beaucoup d’ordinateurs, ce qui est différent. Parce qu’avec les ordinateurs, on fabrique en fait ses propres sons, mais les synthés sont vraiment que des sons formulés de manière électroniques”.

Martin Gore a conclu avec réticence les opérations : “Les chansons sont toujours le plus important pour moi. Même si on utilise cette chose nommée le Synclavier, et même si on est très intéressés par faire des choses d’une manière très moderne, sur notre dernier album, par exemple, l’un des morceaux [Somebody] était juste une acoustique piano/chant, parce qu’on sentait que cette chanson avait besoin de cette sorte de traitement. On ne vaut pas se restraindre en disant : On doit enregistrer cette chanson de cette manière. On est juste intéressés par interpréter les chansons de la meilleure façon possible”.

Depeche Mode est retourné sur les écrans de MTV, interviewés par l’animateur pilier Mark Goodman le 3 juillet. Goodman a commencé par demander à Gahan et Gore, visiblement mal à l’aise, de définir le nom inhabituel du groupe avant que la conversation ne tourne comme on pouvait le prévoir à l’utilisation des synthétiseurs et des ordinateurs au dépends des guitares. “On a toujours en fait beaucoup de mal à essayer de décrire ce processus, a déclaré un Gore démonté. On sample beaucoup, a-t-il commencé timidement. Les gens ont probablement entendu parler de choses comme le Fairlight. Eh bien, on utilise un instrument nommé le Synclavier, qui est très similaire au Fairlight, et on peut juste sampler des sons naturels ou des instruments – tout ce qu’on veut – dans l’ordinateur. Puis [quand] on les a dans le clavier, on peut séquencer ces sons et faire ce qu’on veut avec”.

Simulant de l’étonnement, Goodman n’en savait clairement pas plus. Interrompant temporairement l’interview après quelques minutes pour placer plusieurs minutes de publicités criardes, il a blagué en représentant Gahan et Gore comme des “amis très proches” de REO Speedwago, après le dernier clip en date ennuyant à souhait du groupe AOR, soulignant à la perfection le précédent commentaire d’Andy Fletcher concernant Depeche Mode souvent mis en sandwich entre de tels groupes “beurk progressifs” quand ils ont percé pour la première fois aux États-Unis.

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Une brève série de performances japonaises à Tokyo et à Osaka a été suivie par une autre balade européenne. L’apparition du groupe dans le cadre d’un festival rock en plein air au stade Panathinaiko d’Athènes le 30 juillet était particulièrement mémorable.

Alan Wilder : “Culture Club s’est fait jeter hors de scène à coups de bouteilles, et il y avait une émeute de grande envergure dans les rues – je ne sais pas pourquoi. J’ai tout ça sur vidéo, cependant. Heureusement, on a vraiment bien été reçus, mais c’était une journée bizarre. Si je me souviens bien, Dave a également reçu un poing dans la tronche le lendemain en plein shopping. Des salaud agressifs, hein ?”

Malgré le profil américain de Depeche Mode qui pousse comme un champignon, Shake The Disease n’a pas réussi à percer dans les charts singles du Billboard lors de sa sortie le 30 octobre 1985, quelques six mois après son succès en Europe. Le vaste continent nor américain se révélait être un dur à cuire à bien des égards, après tout.

De plus, le groupe était visiblement absent du Live Aid – le marathon musical télévisé monté de chaque côté de l’Atlantique qui a empoigné le monde occidental le 13 juillet 1985. Alan Wilder était sceptique sur certaines personnes qui ont répondu au cri de ralliement de Bob Geldof, le charismatique leader de Boomtown Rats : “Je doute beaucoup qu’on aurait accepté l’invitation, si on nous avait demandé. Mon opinion personnelle est que donner aux associations caricharlatives devrait être un geste totalement privé, dont on ne devrait tirer aucun gain personnel. Inévitablement, presque tous les artistes qui ont participé au Live Aid ont eu une considérable montée de ventes de disques et, étant le cynique que je suis, je me demande combien du profit gagné de ces ventes a réellement fni par aller en Éthiopie”.

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Depuis l’arrivée du succès, Depeche Mode avait traditionnellement passé la majeure partie de l’été bien installé dans un studio d’enregistrement quelque part, travaillant sur un album prêt à être tourné en automne et en hiver. 1985 ne semblait pas être une exception étant donné que juillet a vu le groupe (et Daniel Miller) entrer dans les Genetic Studios de l’ancien producteur de Human League, Martin Rushent, situé dans le village de campagne boisée de Goring dans le Berkshire. Genetic était réellement dernier cri, comptant à la fois un Fairlight CMI et l’un des deux seuls NED Synclaviers du pays (le deuxième, ironiquement, appartenant à Miller) parmi son inventaire d’équipement impressionnant, avec des facilités pour la détente comme une piscine et un court de tennis. Sur le papier, au moins, Rushent et Depeche Mode semblaient être une paire tombée du ciel, mais un ingrédient crucial du son distinctif des Modes – Gareth Jones, engagé autre part – manquait amèrement. Les premiers fruits des sessions, It’s Called A Heart (mixé aux Livingstone Studios dans le quartier Wood Green à Londres), a causé de la discorde dans les rangs.

Alan Wilder : “It’s Called A Heart doit être mon single de DM que je préfère le moins, que je déteste le plus si j’ose dire, et j’étais contre son enregistrement, encore plus contre sa sortie. En fait, je me suis battu avec acharnement au nom de sa face B, Fly On The Windscreen, qui était bien supérieure. Pour moi, tout le truc était un sérieux pas en arrière. Je pensais avoir travaillé assidûment pour bâtir une reconnaissance d’un son plus dur, avec plus de profondeur et plus de maturité, et voici cette chanson ultra-pop qui ne faisait rien pour notre réputation.

“Tristement, j’ai été mis en minorité par les autres, même s’ils ont reconnu que Fly… était gâchée en morceau additionnel et ont accepté qu’il soit promu sur le prochain album, Black celebration. Même aujourd’hui, j’ai du mal à écouter It’s Called A Heart et dans le cas du Slow Mix [du maxi 45 tours édition limitée] qui était réduit à vitesse réduite, rendant l’expérience deux fois plus longue et doublant l’agonie, on avait besoin d’être particulièrement dévot pour le supporter”.

Le clip qui accompagnait la chanson – qui devait représenter une jungle indonésienne brûlante, aux dires de tous – n’était pas mieux vu par l’opinion méprisante de Wilder : “Tu devras demander au réalisateur, Peter Care, comment il a assimilé appeler quelque chose un cœur avec des caméras qui tournent sur elles-mêmes au bout d’une corde dans un champ de blé exotique de Reading, vêtu d’une jupe. Mais aussi le morceau le demandait ! Hein ?”

Peu importe les sentiments de Wilder, It’s Called A Heart est sorti le 16 septembre. “Si on avait splitté un jour le groupe, ça aurait été à la fn de l’année 1985, a dit Dave Gahan au Melody Maker en 1990. On était vraiment dans un état d’agitation – on se querellait constamment, de manière très intense. On n’était vraiment pas sûr d’où aller après Some Great Reward alors on a décidé de lever le pied”.

Ce processus de ralentissement était peut-être reflété dans le fait que le single coïncidait avec la sortie de The Singles 81>85, effectivement la première compilation de Depeche Mode. En plus de servir de document de l’état de la carrière du groupe, The Singles 81>85 était notable pour être la première sortie de Depeche Mode à comprendre le groupe sur la pochette, bien qu’elle soit une photo noire et blanche teintée sur laquelle Martin Gore apparaissait avec un petit haut noir aguichant dont une bretelle était tombée de son épaule.

“Avant, c’était bien d’attendre que les critiques tombent, a dit Gore, parce qu’au moins 75% étaient si horribles ! C’est pourquoi sur notre premier album de singles, on a effectivement imprimé une bonne [critique] et une mauvaise – juste pour rigoler, et aussi pour dire qu’on s’en foutait un peu”.

Alan Wilder : “L’idée derrière les citations, qui sont en fait à peu près 50% bonnes et 50% mauvaises, était de montrer qu’on ne se prenait pas trop au sérieux et combien les journalistes sont peu fiables dans leurs commentaires.

“Je suppose que c’était assez courageux à l’époque. Un bon point était fait, cependant – en plaçant une bonne et une mauvaise critique de chaque single dans le livret, il est devenu évident de combien on ne devrait pas se soucier de sa propre presse”.

Bien que le single qui sème la discorde, It’s Called A Heart, était inclus sur The Singles 81>85, il était omis de la pochette de l’album à cause de sa sortie soudaine. Avec les coupures de presse, une double page de photos chroniquant le développement du groupe sur les quatre dernières années ornait l’intérieur du gatefold, dont les clichés classiques de l’installation portables autarcique du groupe au Bridgehouse, en 1980.

On était loin des trucs hi-tech déployés sur le Some Great Reward Tour, finalement sorti en vidéo sous le titre The World We Live In And Live In Hamburg chez Mute Films, qui venait d’être lançé. Les plans d’ouverture communiquent l’excitation nerveuse en coulisses du groupe tandis que les accords d’introduction de Master And Servant remplissent la vaste Sporthalle de Alsterdorf d’une capacité de 10 000 personnes.

Andy Fletcher semble particulièrement nerveux quand on le montrait à courir sur place, tel un boxeur, avant de se diriger vers la scène – plutôt remarquable étant donné que les caméras le capturent très rarement en train de jouer quelque chose sur son synthétiseur tout au long de la performance. Au lieu de ça, on voit occasionnellement Fletcher à taper des mains ou à lancer ses poings en l’air avec enthousiasme, laissant le travail de clavier à Wilder et, dans une moindre mesure, Gore.

Témoin d’un concert différent, Bob Doerschuk du magazine Keyboard a présumé automatiquement que Fletcher était responsable de la plupart des lignes de basse. “Eh bien, pas vraiment, était la réponse éloquente de Wilder. Il est difficile d’expliquer ce que fait tout le monde, parce qu’on s’échange tout et on fait différentes choses à différents moments”. Doerschuk a fini par décrire Depeche Mode comme des “maîtres du pur techno-punk européen”. Techno-punk ?

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Pour accompagner The World We Live In And Live In Hamburg se trouvait Some Great Videos 81>85 – l’équivalent visuel de la compilation The Singles 81>85. Le fait que les clips peu mémorables de See You, The Meaning Of LoveLeave In Silence et Get The Balance Right! étaient omis en dit beaucoup. (La compilation passe directement de Just Can’t Get Enough de 1981 à Everything Counts de 1983.)

Loin des feux de la rampe, Dave Gahan a épousé sa fiançée de longue date, Jo Fox, le 4 août 1985, optant pour une cérémonie discrète au Brentwood Registry Office de l’Essex. Après cela, une énorme fête s’est tenue où de nombreux amis musicaux se trouvaient, dont Alison Moyet et Neil Arthur et Stephen Luscombe de Blancmange.

Bien qu’elle ne sortait plus avec Vince Clarke à cette époque, l’ancienne Deb Danahay s’y trouvait : “Je suis allée à la soirée du mariage de Jo et de Dave et le souvenir qui me revient, c’est que c’était vraiment un mariage de tout le monde – beaucoup de proches et d’amis – pas du tout showbiz ni excessif comme beaucoup de célébrités semblent faire maintenant. Je suis quasi certaine qu’un groupe de Basildon a pris un minibus pour aller là-bas, la fête se trouvait sous une marquise”.

Et les mariés dans tout cela ? “Je suis avec Jo depuis six ans maintenant”, a dit un Dave Gahan ravi au magazine pop belge Joepie en 1985. “Mais maintenant qu’on est mariés, on veut avoir des enfants dès que possible et autant que possible !”

Jo Gahan : “C’était un petit truc en famille le matin, puis une réception dans un hôtel – en gros, le repas habituel, suivi par un tas de potes qui font la fête. C’était une journée fabuleuse”.

Pendant ce temps, Andy Fletcher et sa petite amie Grainne Mullen se sont installés dans un nouvel appartement dans le quartier de Maida Vale dans le Nord de Londres. Robert Marlow se souvient de Fletcher qui était resté remarquablement non affecté par le succès mondial en flèche de Depeche Mode : “Je repense avec une vraie nostalgie au moment où Andy vivait sur Warrington Road, parce qu’il avait un petit appartement là-bas. Grainne et Andy n’avaient pas de mômes, alors on allait au pub se faire une bouffe à son endroit habituel, The Warrington, puis on allait placer un pari”.

Tandis que Martin Gore restait à Berlin, Alan Wilder menait une vie londonienne secrète – et quasi recluse – avec sa nouvelle petite amie, Jeri Young, en s’installant d’abord dans son appartement de Kilburn, puis en “adoptant” son fils, Jason. “Non seulement, c’est la mère de mon enfant, a-t-il révélé à l’époque, mais c’est aussi une excellente coiffeuse. Chaque matin, elle passe 20 minutes à arranger mes cheveux. Ça prend toute une bouteille de spray !”

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Le 11 novembre, les fans américains de plus en plus nombreux de Depeche Mode ont tardivement reçu la compilation The Singles – bien que sous le titre pas si subtil de Catching Up With Depeche Mode (“Rattraper son retard avec Depeche Mode”). Malgré avoir passé 18 semaines dans le Top 200 du Billboard après son entrée le 7 décembre, l’album n’a culminé qu’à la 113ème position. Avec la compilation People Are People concoctée en 1984, ce ne serait pas la dernière fois que Depeche Mode souffrirait aux mains des cadres du marketing de Sire. (2)

Au même moment, Martin Gore écrivait des chansons destinées au prochain album.

Alan Wilder : “Martin [Gore] et moi, on compose de manières complètement différentes. Martin travaille à la guitare et moi aux claviers. Pourtant on présente nos chansons sur une machine quatre pistes, et en gros, on obtenait une démo au point où il y a une ligne de basse, un vague morceau rythmique, la plupart des mélodies et toutes les paroles. C’est ce qu’entend le groupe. Puis on s’asseoit avec Daniel, on choisit les chansons qu’on veut mettre sur l’album, et on parle des points bons et mauvais – si on doit changer la structure ou ajouter ou retirer des bouts ça et là ou non”.

Ironiquement, tout en n’étant pas représenté sur le plan chanson sur leur prochain effort, Wilder a été instrumental dans le façonnage du son de ce qui sera un album de Depeche Mode radicalement différent.

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(1) Moins de trois ans plus tard, Neil Tennant fera ironiquement quasiment la même chose quand son propre duo synthétique, Pet Shop Boys, culminera dans les charts singles britanniques avec It’s A Sin

(2) Shake The Disease coulera sans laisser de traces après sa sortie du 30 octobre, et un sort similaire attendra It’s Called A Heart, sorti en maxi 45 tours le 22 janvier 1986. 

Traduction – 27 janvier 2008

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